Vous sortez de chez votre cardiologue : Il vient de vous annoncer que votre maladie ou celle d’un de vos proches nécessite un « Remplacement Valvulaire Aortique » car votre valve aortique s’est progressivement rétrécie en se calcifiant. Pas d’affolement ! Ce n’est pas une catastrophe, mais quelque chose de tout à fait banal et courant. Ce rétrécissement aortique calcifié est une maladie très fréquente (+ de 10.000 remplacement valvulaire aortiques ont été réalisés en France cette année, plus de 400 à La Pitié). Il s’agit d’une de ces maladies d’usure liées au vieillissement de la population, comme celles nécessitant une prothèse de hanche ou du genou, ou encore la chirurgie de la cataracte.

Votre valve aortique qui est située à la sortie du ventricule gauche, à l’origine de l’aorte, s’ouvre à chaque battement de votre cœur depuis que vous êtes né ( 60 à 70 fois par minute).
Au fil des années, elle s’est progressivement rigidifiée, calcifiée, rétrécie. C’est comme « votre lavabo qui s’entarte », il faut faire quelque chose avant que votre valve se « bouche complètement » et que le sang ne coule plus à travers elle !!!

Pour le lavabo, on a « le Destop » ; pour votre valve on n’as pas encore le produit pour la déboucher, il va falloir la changer et la remplacer par une valve neuve.

Si l’on prend une autre comparaison, votre valve aortique peut être comparée à la soupape d’un moteur. Le moteur, c’est le muscle cardiaque. Le ventricule gauche, qui s’efforce de faire passer le sang à travers votre valve qui est de plus en plus rétrécie, se fatigue ; il faut qu’on le soulage avant qu’il ne puisse pas récupérer.
Il faut donc faire cette intervention de remplacement de la valve aortique avant qu’il soit trop fatigué, cela se traduisant par des syncopes. Il ne faut pas les attendre, car il y a un grand risque que l’on n’arrive pas à vous réanimer lors de la syncope, il faut faire les choses avant dans le calme.
Pour essayer de mieux comprendre, si vous le voulez bien, nous allons faire ensemble le tour du sujet, en essayant de répondre à quelques questions que vous devez  vous poser.

Il se trouve que vous avez progressivement rétréci votre orifice aortique en calcifiant votre valve au fil des années. Vous n’y êtes pour rien, votre valve avait probablement une petite anomalie de fabrique entraînant des tourbillons au passage du sang à travers elle. Cette petite gêne à l’écoulement du sang a entraîné des dépôts de calcium à ce niveau.

Plus l’orifice de votre valve se rétrécit, plus le phénomène s’accélère et dans les derniers mois ce processus peut aller très vite. Comme on ne possède pas actuellement de produit miracle pour « déboucher votre valve » comme pour votre lavabo, force est de faire autrement pour redonner une bonne pression et un bon écoulement du sang dans vos tuyaux (pardon ! vos artères).

Mais ne peut-on faire autrement ?

Eviter l’opération me direz vous.
Bien sûr, votre cardiologue a envisagé toutes les possibilités avant de vous proposer cette solution.
Lorsque le rétrécissement n’était pas serré, il s’est contenté de surveiller la taille de celui-ci en répétant les échographies cardiaques et en vous donnant des médicaments pour aider votre muscle cardiaque.
Maintenant soit parce qu’il est devenu sérré sur les différentes mesures, soit parce que des symptômes sont apparus : essoufflement, douleurs thoraciques, il vous a proposé la chirurgie, car il n’y a pas d’autre solution.
Si votre cardiologue avait pu faire autrement, il l’aurait fait.
Les chirurgiens sont des gens certes « charmants », mais on préfère généralement les voir de loin. Cependant le recours à eux est parfois nécessaire voire indispensable.
Vous allez voir que tout va bien se passer. Votre chirurgien vous expliquera ce qu’il compte vous faire, posez lui des questions,  n’hésitez pas !
Ce ne sont pas des « gens inaccessibles ».

Il s’agit d’une intervention très fréquente, qui est une des plus simples.

Image d’une valve aortique normale

Image d’un rétrécissement aortique calcifié

Avec quoi fait-on le remplacement valvulaire aortique ?

On ne sait pas réparer la valve aortique lorsqu’elle est massivement calcifiée, comme c’est votre cas, il faut donc la retirer et la remplacer par une valve artificielle. La valve idéale n’existe pas, même celle « du bon Dieu » n’est pas parfaite puisque elle s’use, comme la vôtre.

Cependant, on a d’excellentes prothèses valvulaires artificielles.

Pour simplifier il y a deux familles de prothèses :

  • Les prothèses mécaniques
  • Les bioprothèses

Les prothèses mécaniques sont actuellement des valves à ailettes en Carbone pyrolytique, faites de deux demi disque. Elles ont une durée de vie quasi illimitée pourvu que l’on prenne, avec soin, un traitement anticoagulant à vie pour éviter tout risque d’embolie.

Les bioprothèses sont des valves aortiques de porc ou des valves artificielles faites avec du tissu biologique animal (péricarde).
Elles ne nécessitent pas de traitement anticoagulant, mais comme elles sont tannées pour supprimer toute antigénicité, elles tendent à se calcifier au fil des années, ce d’autant plus que l’on est jeune.

Compte tenu de ces différentes caractéristiques, l’habitude est de poser des valves mécaniques avant 70 ans sauf contre-indications aux anticoagulants, et de proposer des valves biologiques au-delà, lorsque la durabilité de la bioprothèse est supérieure à l’espérance de vie du patient.

C’est votre opération

A votre réveil, vous serez porteur d’une ou plusieurs perfusions et d’électrodes reliées à des appareils. Ces électrodes permettent de surveiller en permanence votre état de santé et d’alerter les soignants sur les variations des différents paramètres (tension artérielle, pouls…). Afin que vous ne les arrachiez pas, vous aurez les mains attachées jusqu’au réveil complet.

Vous serez hospitalisé généralement la veille de l'intervention.

Cette journée sera mise à profit pour refaire les derniers examens :

  • radiographie de thorax,
  • électrocardiogramme,
  • analyse de sang pour étudier en particulier la coagulation de votre sang,
  • visite pré-anesthésique.

On en profitera pour nettoyer votre peau, la désinfecter, la raser (tondre) si nécessaire sur les zones où l’on vous opérera.

Vous pouvez manger et boire jusqu’à minuit environ, si vous êtes opéré tôt le lendemain matin. Une petite aide (somnifère) vous sera proposée afin de bien vous reposer la nuit précédant l’intervention. Le lendemain avant que l’on ne vienne vous chercher, le plus souvent, vous recevrez une « prémédication » afin de vous relaxer avant que les anesthésistes ne vous préparent à l’intervention.

L'intervention proprement « dite »

L’intervention consiste à faire le changement de votre valve sous CEC. Le chirurgien ouvre votre aorte et inspecte votre valve aortique pour vérifier la nature du rétrécissement. Il va, tout d’abord, retirer la valve aortique malade en décalcifiant avec soin sa zone d’insertion : l’anneau aortique.

Il mesure ensuite avec exactitude le diamètre de l’orifice pour choisir la bonne taille de valve qui s’adapte à votre anneau aortique.

Il va ensuite coudre votre valve en passant toute une série de points de suture à la fois dans votre anneau aortique et dans la collerette de votre valve.

Une fois que ces points ont été passés, la valve est descendue dans l’aorte et nouée solidement en place.

Il ne reste plus qu’à refermer votre aorte pour la rendre étanche et retirer l’air qui est entré dans votre cœur avant de le faire repartir.